Les statuts

Suppléant provisoire (facultés de droit d’Etat)

Le statut de suppléant provisoire est une création purement coutumière, que l’on voit poindre dans les années 1820 et à laquelle l’administration a eu abondamment recours pendant une vingtaine d’années à partir de 1830.

Le suppléant provisoire était un docteur en droit, souvent distingué à l’occasion des divers concours, que l’on chargeait de suppléer les professeurs et/ou les professeurs suppléants titulaires, lorsque ces derniers étaient eux-mêmes empêchés pour cause de maladie ou de concours, ou bien encore décédés sans que leur successeur ait été encore installé. La délégation qui leur était consentie était provisoire, parfois simplement de quelques mois, et, par conséquent, le statut de ces vacataires du 19e siècle était tout aussi précaire que celui de leurs équivalents contemporains.

La dénomination de suppléant provisoire disparaît progressivement après l’instauration du concours d’agrégation des facultés de droit au profit de celle de chargé de cours.

Chargé de cours (facultés de droit d’Etat)

La dénomination apparaît dans les facultés de droit, non sans quelques tâtonnements, dans les années suivant l’instauration du concours national d’agrégation, soit à la fin des années 1850. Les textes les nommant ont pu, en effet, recourir parfois aux expressions de « délégué dans les fonctions d’agrégé », ou de « chargé des fonctions d’agrégé » et même encore celle de « suppléant ». La dénomination de chargé de cours, qui s’est finalement imposée, n’est pas très heureuse. Elle est, en effet, source d’ambiguïtés, puisqu’elle était utilisée pour tout enseignant, quel que soit par ailleurs son statut (agrégé, professeur titulaire), dès lors qu’il était chargé de cours complémentaire ou qu’il assurait les enseignements relevant d’une chaire vacante dans sa faculté de rattachement ou bien encore lorsqu’il était appelé à assurer une charge d’enseignement dans une autre Faculté que celle à laquelle il était attaché. Toutefois, les chargés de cours sont le plus souvent de jeunes docteurs en droit qui, candidats malheureux à l’agrégation, avaient néanmoins été déclarés admissibles, et que le jury dudit concours d’agrégation présentait à l’issue des épreuves à la recommandation du ministre, afin d’assurer des enseignements vacants dans les facultés. Cette désignation, de la part du jury, valait encouragement à persévérer dans la voie de l’obtention de l’agrégation. Il fut d’ailleurs rappelé, par circulaire du 27 janvier 1882, aux docteurs chargés de cours dans les facultés de droit qu’ils ne devaient sous aucun prétexte laisser passer un concours sans s’y présenter, faute de quoi ils seraient à l’avenir écartés.

Dans la foulée de la loi du 10 juillet 1896, les universités reconstituées ont reçu la possibilité de créer elles-mêmes des emplois de chargés de cours, lesquels étaient alors rémunérés sur les fonds propres de l’université. Les candidatures étaient arrêtées par le Conseil de l’Université, après avis de la faculté intéressée, et les chargés de cours étaient nommés par arrêté rectoral (art. 14 du décret du 21 juillet 1897 relatif aux Conseils des Universités).

Qu’ils aient été nommés par arrêtés ministériels ou par arrêtés rectoraux, les chargés de cours n’enseignaient qu’en vertu d’une délégation précaire, susceptible d’être remise en cause chaque année. Ils étaient toutefois considérés comme des fonctionnaires publics.

Bibliographie :

  • « Instruction Publique », in Répertoire général alphabétique du droit français : contenant sur toutes les matières de la science et de la pratique juridiques l'exposé de la législation, l'analyse critique de la doctrine et les solutions de la jurisprudence.... publié sous la direction de Ed. Fuzier-Herman, Tome 24, 1896.
  • Joseph Delpech, Statut du personnel enseignant et scientifique de l’enseignement supérieur, Paris, Sirey, 1935 (2e édition)
  • « Instruction Publique », Répertoire du droit administratif Béquet, Paris, 1902.

Professeur suppléant (facultés de droit d’Etat)

Catégorie créée par la loi du 22 ventôse an XII (13 mars 1804) en ses articles 35 à 37, elle est vouée à disparaître par extinction lorsqu’est instituée la catégorie des agrégés près les facultés de droit (décret du 22 août 1854, art.9). La loi du 22 ventôse an XII et le décret du 4e jour complémentaire de l’an XII (21 septembre 1804), peu diserts sur leurs attributions, semblent avoir considéré que le titre parlait de lui-même. Les professeurs suppléants étaient voués, en effet, au remplacement des professeurs titulaires d’une chaire lorsque ceux-ci étaient empêchés, pour quelque raison que ce fût, d’assurer leur enseignement, ils prenaient pleinement part aux examens et pouvaient être désignés comme membre des jurys des concours aux divers emplois de l’enseignement supérieur. Toutefois, il ne leur fut jamais possible d’être admis au Conseil de la faculté, lequel était composé par les seuls professeurs titulaires. En application de l’ordonnance du 22 mars 1840, la possibilité s’est ouverte aux suppléants de proposer la création de cours dits libres ou complémentaires dont ils avaient ensuite la responsabilité de l’enseignement. La mise sur pied de ces enseignements nouveaux, gratuits et facultatifs, restait soumise à autorisation du ministre de l’Instruction publique, laquelle devait être, en outre, renouvelée chaque année.

Le décret du 4e jour complémentaire de l’an XII, ce dernier texte prévoyait que le nombre de ces professeurs suppléants, initialement fixé à deux dans chacune des facultés créées par le même texte, pourrait s’élever par la suite « suivant l’importance et les succès que les écoles auront obtenus ».

Les premiers professeurs suppléants ont été nommés par le Premier Consul sur présentation effectuée par les inspecteurs généraux. La loi n’avait toutefois prévu ce régime qu’à titre transitoire et exceptionnel, afin de faciliter la mise en place des facultés. Elle prévoyait pour l’avenir un recrutement par voie de concours public apprécié par un jury composé, entre autres, de professeurs titulaires. Les modalités de ce concours ont fait l’objet de très nombreuses modifications puisqu’elles ont été réglées successivement par les statuts du 18 avril 1809, 31 octobre 1809, 5 juin 1810, 21 décembre 1818, 10 mai 1825, 15 juin 1832, et par les règlements du 2 mars 1840, 29 juin 1841, 22 août 1843, 16 mai 1850. Depuis l’origine, le concours était ouvert aux candidats docteurs en droit, âgés de 25 ans accomplis. Toutefois, engendré depuis les années 1790 d’abord par le rejet révolutionnaire de la professionnalisation, puis par la décision radicale de supprimer les universités, le déficit en docteurs était trop considérable pour permettre d’appliquer immédiatement le principe dans toute sa rigueur. Il a donc été posé, à titre transitoire, que de simples licenciés en droit pourraient concourir pour un emploi de suppléant. Cette dernière disposition a été prolongée par une ordonnance du 12 août 1818 jusqu’en 1825. Le concours permettait par ailleurs aux plus valeureux de ces candidats licenciés en droit, quand bien même ils n’auraient pas été finalement élus, de se voir décerner le titre de docteur, si le jury les en jugeait dignes.

Dans le premier tiers du 19e siècle, les concours se déroulaient localement, devant chacune des facultés où un ou plusieurs emplois de suppléant se trouvaient vacants. Toutefois, dans les années 1840, l’habitude commença à être prise de n’ouvrir qu’un unique concours devant une seule faculté de droit, afin de pourvoir à plusieurs emplois vacants en diverses facultés. Si elle cherchait probablement à éviter les dérives qu’engendre toujours une trop étroite cooptation locale, cette pratique s’expliquait aussi par une indéniable rationalité administrative. On évitait ainsi la multiplication des jurys, les déplacements des candidats à travers toute la France et l’indisponibilité prolongée, autant que répétée, tout à la fois des juges et des candidats, cette dernière étant évidemment source de désorganisation des services.

Cette politique du concours unique, tant pour les chaires que pour les emplois de suppléants, a profité largement à la Faculté de droit de Paris, fréquemment désignée pour être le siège du concours, de sorte que dans les années 1840 s’enracine la tradition, qui devait triompher à partir de 1856, consistant à faire de la capitale le lieu obligé du concours d’agrégation des facultés de droit.

Quel que fût le lieu où se déroulait le concours, l’aspirant suppléant s’y inscrivait en précisant pour quel emploi précis il entrait en lice, de sorte que s’il triomphait des épreuves, il était assuré d’être installé dans la faculté qu’il avait choisie au moment de son inscription.

Parce qu’elle était obtenue par concours, la fonction de professeur suppléant était acquise à vie, et ce, au sens plein du terme, puisqu’il n’existait pas plus pour les suppléants que pour les professeurs titulaires d’âge légal de la retraite. Même si la pratique montre bien que les suppléants finissaient très souvent par obtenir la chaire de ceux des professeurs qu’ils avaient remplacés, parfois de longues années durant, l’exercice d’une suppléance n’ouvrait cependant aucun droit acquis à l’obtention future d’une chaire. Pour devenir professeur titulaire d’une chaire, il était impératif que le suppléant subît à nouveau les épreuves d’un concours spécifique où il risquait de se trouver en concurrence avec de simples docteurs en droit.

Bibliographie :

  • A. de Beauchamp, Recueil des lois et règlements sur l'enseignement supérieur : comprenant les décisions de la jurisprudence et les avis des conseils de l'Instruction publique et du Conseil d'État, Tome 1 (1789-1847), Paris, 1880.

Agrégé des facultés de droit

Agitée par Victor Cousin en 1840, l’idée de créer un corps des agrégés des facultés de droit est réapparue en 1847, comme en atteste le projet de loi relatif à l’enseignement du droit présenté le 19 mars à la Chambre des Pairs par le ministre de l’Instruction Publique, Salvandy. Il fallut toutefois attendre le décret du 22 août 1854 (art.9) pour que le corps des agrégés des facultés de droit succède enfin au corps des professeurs suppléants, tout en héritant en large mesure de ses attributions, lesquelles furent toutefois à certains égards renouvelées. En sus du remplacement des professeurs titulaires empêchés et de la responsabilité d’éventuels cours complémentaires, le décret du 22 août 1854 leur confie, en effet, expressément la charge des conférences facultatives - ancêtres de nos actuels travaux dirigés – qu’il venait de créer. Ces diverses fonctions ont été encore confirmées par les décrets du 28 décembre 1885 et du 30 juillet 1886.

Toutefois, puisque les anciens concours pour les chaires avaient été supprimés par le décret du 9 mars 1852, les agrégés des facultés de droit, contrairement à leurs prédécesseurs, professeurs suppléants, avaient désormais vocation à constituer le vivier de prédilection dans lequel le pouvoir exécutif pouvait puiser pour pourvoir, par la voie de la nomination, aux fonctions de professeur titulaire. La sélection des agrégés devait dès lors s’effectuer par la voie d’un concours national dont le décret du 22 août 1854 avait annoncé la création. Ses modalités furent arrêtées pour la première fois par le statut du 20 décembre 1855 et le premier concours d’agrégation des facultés de droit se déroula en novembre 1856. Les modalités d’organisation du concours, et au premier chef la conception de ses épreuves, ont donné lieu à de très nombreuses modifications ; la plus importante, à partir de l’arrêté du 23 juillet 1896, étant le sectionnement de l’agrégation unique en quatre agrégations spécialisées : droit privé et sciences criminelles, droit public, droit romain et histoire du droit, économie politique. Cependant, par-delà les innombrables modifications et retouches affectant la nature et l’organisation des épreuves, les conditions exigées des candidats sont, elles, demeurées globalement stables : être citoyen français ou naturalisé français, âgé de 25 ans accomplis et docteur en droit. Pour les candidats les plus précoces, il était toujours possible d’obtenir une dispense d’âge accordée par le ministre de l’Instruction Publique.

A la différence de leurs prédécesseurs suppléants, les aspirants agrégés ne concouraient évidemment plus pour un emploi précisément localisé dans la faculté de leur choix. Les candidats ayant réussi le concours étaient, en effet, mis à la disposition du ministre de l’Instruction Publique, lequel pouvait les attacher à l’une ou l’autre des Facultés, au gré des nécessités du service.

Au contraire encore du statut de professeur suppléant auquel il succède, celui d’agrégé des facultés de droit était, dès sa création, très clairement conçu comme un statut temporaire, l’exercice des fonctions d’agrégé ne devant constituer qu’une étape dans la carrière. L’agrégé était, en effet, considéré comme un novice et un apprenti qui devait encore faire la preuve de la réalité de ses aptitudes professionnelles à l’enseignement supérieur, le concours n’ayant pu montrer que la possession de connaissances indispensables.

« Si après dix ou douze ans d’exercice, un agrégé, malgré les fréquentes occasions qui lui sont offertes de prouver son aptitude à l’enseignement ou de se distinguer par des publications originales, n’a pu obtenir la recommandation de la Faculté près de laquelle il est placé et mériter de fixer le choix du gouvernement, c’est qu’il est condamné à une irrémédiable médiocrité. Il faut qu’il rentre dans la foule et qu’il cède la place à de plus dignes. » (Circulaire Fortoul du 13 février 1856). Le ministère de l’Instruction publique entendait donc conserver la possibilité de se séparer d’un agrégé qui se serait révélé inférieur à la tâche. C’est la raison pour laquelle, au sortir du concours, les agrégés étaient institués pour une période de dix ans, éventuellement renouvelable si dans cet intervalle de temps une titularisation n’était pas intervenue. Dans le cas où l’administration centrale aurait été amenée à se séparer de lui, l’agrégé devait prendre le titre d’agrégé libre, le ministre se réservant de pouvoir le rappeler en fonction des nécessités du service. Cette disposition est demeurée en vigueur jusqu’à l’arrêté du 25 juillet 1929, à partir duquel il n’a plus été fait mention d’une institution à temps. Toutefois, sans revenir exactement sur cette disposition, le décret du 31 octobre 1950, portant règlement d’administration publique relatif à certaines conditions de nomination et d’avancement des agrégés, introduisait une réserve d’un nouveau genre puisqu’il prévoyait en son article 2 que serait caduque l’institution de tout candidat reçu qui n’aurait pas occupé son poste et exercé effectivement ses fonctions pendant quatre ans.

Le titre traditionnel d’« agrégé des facultés de droit », d’abord modifié en celui d’ « agrégé des facultés de droit et des sciences économiques », s’est transformé à la suite du décret du 29 mars 1963 en titre de « maître de conférences agrégé des facultés de droit et des sciences économiques ». Ce dernier a connu un ultime avatar après la promulgation de l’arrêté du 9 juillet 1971 instituant cette fois-ci des « maîtres de conférences des sciences juridiques, politiques, économiques et de gestion », toujours recrutés par la voie du concours d’agrégation. Par décret du 9 août 1979, ces derniers ont été intégrés dans le corps des professeurs des universités qui venait d’être créé et dont il était prévu qu’il serait à l’avenir recruté par la voie du concours d’agrégation.

Bibliographie :

  • A. de Beauchamp, Recueil des lois et règlements sur l'enseignement supérieur : comprenant les décisions de la jurisprudence et les avis des conseils de l'Instruction publique et du Conseil d'État, Tome 1 (1789-1847), Paris, 1880.
  • Réforme de l’enseignement. Recueil des lois, décrets, arrêtés, instructions, circulaires et notes ministérielles concernant les modifications apportées à l’Instruction Publique pendant le Ministère de M. H. Fortoul, Tome 2, Paris, 1886.
  • J. Delpech, Statut du personnel enseignant et scientifique de l’enseignement supérieur, Paris, Sirey, 1935 (2e édition). Du même, même titre, 2e édition entièrement refondue jusqu’au 15 janvier 1949, Paris, Sirey, 1949.

Chargés de conférences (facultés de droit d’Etat)

Les conférences, ancêtres des travaux dirigés, avaient été primitivement confiées aux seuls agrégés des facultés de droit. A partir de l’arrêté du 30 avril 1895, elles ont pu, en outre, être confiées non seulement aux professeurs titulaires d’une chaire qui le désiraient, mais encore à de simples docteurs en droit, désignés par le Conseil de la Faculté. Ceux-ci prirent alors le titre de chargés de conférences ou même – la terminologie, purement usuelle, ayant été au commencement un peu flottante – de directeurs de conférences, voire, plus rarement, de maître de conférences. Ainsi que l’expliquait la circulaire du 31 octobre 1895, le nouveau régime du doctorat qui venait d’entrer en vigueur en avril de la même année faisait peser des charges de plus en plus lourdes sur le personnel statutaire. Il devenait nécessaire d’appeler en renfort de jeunes docteurs qui, par la même occasion, pourraient éprouver tant leur vocation que leurs aptitudes pour l’enseignement et constituer une pépinière de candidats à l’agrégation.

La loi du 23 avril 1946 a modifié la dénomination usuelle de « chargés de conférences » en énonçant que les docteurs en droit qui assistent les professeurs et agrégés pour les conférences et travaux pratiques des étudiants des facultés de droit prendraient désormais le nom de « chargés de travaux pratiques ».

Bibliographie : J. Delpech, Statut de l’enseignement supérieur (personnel enseignant et scientifique), Paris, Presses Universitaires de France, 1922.

Professeur adjoint

Le titre de professeur adjoint, qui n’est pas propre au personnel des facultés de droit, a été créé par l’article 40 du décret du 28 décembre 1885. Ce titre, d’après l’exposé des motifs du décret du 28 décembre 1885, était destiné à ceux, - maîtres de conférences, chargés de cours ou encore agrégés - , « que la fatalité des circonstances arrêterait trop longtemps ou même toujours dans ces fonctions auxiliaires ». Il était donné par décret, sur la proposition du Conseil de la faculté et après avis de la section permanente du Conseil Supérieur de l’Instruction Publique. Il conférait à ses bénéficiaires, à défaut d’un traitement financier identique, des prérogatives équivalentes à celles des professeurs titulaires d’une chaire. Il leur permettait, notamment, de siéger au Conseil de la Faculté et d’être éligible au Conseil général des Facultés, lequel devait devenir, en 1896, Conseil de l’Université, même s’ils ne pouvaient évidemment pas prendre part aux délibérations susceptibles de les concerner personnellement, au premier chef celles relatives à la présentation aux chaires vacantes. Parmi les avantages que conférait le titre de professeur adjoint, l’un des plus appréciés était le droit de compter entières les années de service pour l’ancienneté et l’avancement, alors que jusqu’en 1919, les années en qualité de chargé de cours, d’agrégé ou de maître de conférences n’étaient comptées que pour moitié. (Circulaire du 31 décembre 1885, relative à l’exécution du décret du 28 décembre 1885 sur l’organisation des facultés et des écoles d’enseignement supérieur).

Dans les facultés de droit, le titre de professeur adjoint a été très souvent conféré à des agrégés dont la titularisation tardait à venir en raison du trop faible nombre de chaires vacantes. Le titre permettait donc à la Faculté à laquelle les agrégés étaient attachés de reconnaître les mérites de ces jeunes enseignants ainsi symboliquement encouragés à patienter, en même temps qu’il était une manière de faire savoir au ministère le soutien que leurs collègues apportaient à ceux dont la titularisation sur une chaire se faisait attendre. Avec le décret du 4 janvier 1921, le titre de professeur adjoint a disparu et il lui a été substitué celui de professeur sans chaire.

Bibliographie :

  • Louis Liard, Universités et Facultés, Paris, 1890.
  • « Instruction Publique », Répertoire du droit administratif Béquet, Paris, 1902.
  • Ministère de l’Instruction Publique et des Beaux Arts, Organisation des Facultés et Ecoles d’enseignement supérieur, Collection « Enquêtes et Documents relatifs à l’enseignement supérieur », Volume XXII, Paris, Imprimerie nationale, 1886.

Professeur titulaire sans chaire

Créé par le décret du 4 janvier 1921, ce nouveau titre, rapidement écourté en « professeur sans chaire », prenait une nouvelle fois acte de la croissance numérique des personnels employés dans les diverses facultés en qualité de chargés de cours, maîtres de conférences et/ou agrégés, alors que le nombre des chaires était, lui, bien loin d’augmenter dans des proportions comparables et interdisait donc d’assurer un avancement régulier et méthodique du personnel. Cette création a été motivée, en outre, par plusieurs considérations d’ordres très différents. Faute de pouvoir créer en nombre conséquent de nouvelles chaires, il s’agissait de donner à des personnels méritants un prestige professionnel équivalent à celui des professeurs titulaires d’une chaire, d’autant, avançait-on, que seul le titre de professeur était reconnu à l’étranger. Il est vrai que l’ancien titre de « professeur adjoint », auquel succédait celui de professeur sans chaire, constituait à cet égard une formulation peu heureuse, le qualificatif « adjoint » entretenant l’image d’un professeur de second rang.

Afin de créer cette égalité de prestige, il était prévu que les professeurs sans chaire seraient soumis à la même procédure de nomination que les professeurs titulaires et qu’ils disposeraient des mêmes droits, notamment de celui participer à la vie des institutions facultaires et universitaires, sous réserve qu’ils ne pourraient pas prendre part aux votes sur les questions susceptibles de concerner directement leur propre avenir professionnel, soit pour les demandes de transfert ou de présentation aux chaires vacantes. Si l’on peut douter que l’égalité de prestige que le ministre disait vouloir instaurer soit bien devenue réalité, il est certain, en revanche, qu’il était hors de question en 1921 qu’elle engendrât la plus petite répercussion financière.

Les professeurs sans chaire demeuraient donc, au chapitre de leur rémunération et de leur avancement, inscrits au tableau du groupe auquel ils appartenaient antérieurement, c’est-à-dire à celui des agrégés, chargés de cours ou maître de conférences. Le décret du 4 janvier 1921 les classait néanmoins pour ordre dans la 4e classe des titulaires et prévoyait expressément que les années de titulariat sans chaire entreraient dans le décompte des années de séjour dans la 4e classe des professeurs titulaires. Qualifiée de « mesure de prévoyance » par la circulaire du 12 janvier 1921, cette disposition n’avait évidemment de véritable intérêt que si le professeur sans chaire finissait un jour par accéder à une chaire. Il est vrai que le décret du 30 décembre 1919 ayant décidé que les années de service dans l’enseignement supérieur public compteraient entières pour tous les emplois, sans exception, de l’enseignement supérieur, il avait supprimé l’avantage dont bénéficiaient jusqu’alors exclusivement les professeurs adjoints pour leur avancement. Le décret du 4 janvier 1921 restituait à leurs successeurs un avantage de carrière, même si celui-ci pouvait demeurer des plus hypothétiques pour nombre d’enseignants.

La proportion des professeurs sans chaire était fixée au tiers du nombre des titulaires de chaire dans les facultés de droit, médecine et sciences et, par exception, à la moitié dans les facultés de lettres où le nombre de maîtres de conférences bloqués dans leur avancement était tout à fait considérable. Ce titre a été usité jusqu’au décret du 9 août 1979 portant statut particulier du corps des professeurs des universités, à partir duquel les professeurs sans chaire ont été intégrés dans le nouveau corps qui venait d’être créé.

Bibliographie :

  • Journal Officiel de la République française, lois et décrets, 7 janvier 1921, pp. 453-454. (Le texte du décret est précédé du rapport du ministre de l’Instruction Publique au Président de la République)

Professeur titulaire à titre personnel

Statut commun aux divers ordres de facultés, il avait été, en réalité, conçu prioritairement pour les facultés de lettres et de sciences. Annoncé par les lois de finances des 16 avril 1930 (JO du 17 avril 1930, p. 4311) et 31 mars 1931 (JO du 1er avril 1931, p. 3666), cette dernière créant les dix premiers emplois (5 pour les sciences, 5 pour les lettres), il a été réglé à l’origine par le décret du 1er août 1931. Ce nouveau statut était inspiré par des considérations identiques à celles qui avaient déjà conduit en 1885 à la création du titre de professeur adjoint, puis en 1921, à l’apparition de la catégorie des professeurs sans chaire. Les personnels employés dans les diverses facultés étaient de plus en plus nombreux, les chaires demeuraient toujours en nombre limité et les déroulements de carrière, notamment dans les facultés de lettres et de sciences, continuaient en conséquence à souffrir cruellement de la pénurie déjà ancienne de chaires disponibles.

Toutefois, ce nouveau statut différait des précédents en ce qu’il ne constituait pas seulement un remède symbolique. Il amorçait une révolution dans la conception française du titulariat - révolution que d’aucuns avaient souhaité dès la fin du 19e siècle (cf. circulaire du 30 mai 1889) -, en introduisant le titulariat à titre personnel à côté du traditionnel titulariat lié à une chaire. La qualité de professeur titulaire n’était désormais plus exclusivement attachée à l’obtention d’une chaire, mais elle pouvait être attachée à la personne elle-même, qui la conservait dès lors en cas de mutation. Les droits, prérogatives et obligations des professeurs à titre personnel étaient rigoureusement identiques à ceux des professeurs titulaires d’une chaire et le mode de nomination des professeurs titulaires à titre personnel avait été rapproché le plus possible de celui de leurs prédécesseurs, titulaires de chaire.

En conséquence, les emplois de professeurs à titre personnel étaient ouverts à des candidats docteurs en droit, par ailleurs maîtres de conférences ou agrégé sans limite de temps, âgés d’au moins 30 ans et ayant enseigné depuis au moins deux ans dans une faculté. A l’imitation du régime applicable aux chaires de création nouvelle, les emplois nouveaux de titulaires à titre personnel étaient pourvus directement à la nomination par décret, sans présentation ou proposition préalable. Seuls les emplois déjà créés et déclarés vacants devaient être pourvus à partir des propositions, faites en nombre double de celui des emplois à pourvoir, conjointement effectuées par les Conseils des Facultés, le Comité Consultatif de l’Enseignement Supérieur et la section permanente du Conseil de l’Instruction Publique. Les professeurs à titre personnel ont été intégrés dans le corps des professeurs des universités, créé par le décret du 9 août 1979.

Bibliographie :

  • Journal officiel de la République française du 5 août 1931, décret du 1er août 1931, précédé du rapport du Ministre de l’Instruction publique au Président de la République, p. 8543.
  • Françoise Mayeur, « L’évolution des corps universitaires 1877-1968 », Le personnel de l’enseignement supérieur en France aux XIXe et XXe siècles, Paris, Editions du CNRS, 1985, p. p. 11-28.

Professeur titulaire d’une chaire

Corps créé dans les écoles de droit par la loi du 22 ventôse an XII (13 mars 1804) et étendu aux autres ordres de facultés à partir de 1808, les professeurs titulaires d’une chaire ont été appelés à disparaître en vertu de l’article 33 de la loi d’orientation de l’enseignement supérieur du 12 novembre 1968, dite loi Edgar Faure, supprimant la traditionnelle distribution des enseignements sous formes de chaires personnellement attribuées. Il a fallu toutefois attendre le décret du 9 août 1979 créant le corps nouveau des professeurs d’université pour que cette disparition devienne effective.

Si, pour la première installation des diverses écoles de droit, les professeurs avaient été nommés par le chef de l’Etat sur présentation de deux candidats effectuée par les inspecteurs généraux, il était prévu pour l’avenir que les professeurs titulaires ne pourraient être recrutés que par la voie de concours ouverts localement pour les chaires. Ces concours auraient dû être généralisés dans tous les ordres de facultés (article 7 du décret du 17 mars 1808), mais ils n’ont en réalité pas fait beaucoup d’émules dans l’Université française, à l’exception des facultés de médecine. Les concours pour les chaires des facultés de droit n’auraient dû être ouverts qu’aux candidats docteurs en droit, âgés d’au moins trente ans, ces deux conditions d’âge et de grade universitaire étant par ailleurs communes à l’ensemble des professeurs titulaires quel que soit l’ordre de faculté auquel ils prétendaient. Toutefois, le manque cruel et persistant de possesseurs de ce dernier diplôme a justifié, qu’à titre transitoire, jusqu’au 1er janvier 1825, il fût possible à de simples licenciés de concourir pour les chaires et d’obtenir à l’occasion même du concours le grade de docteur. Il est encore à souligner que la nomination directe des professeurs par le ministre demeurait la règle pour toutes les chaires de création nouvelle. Cette règle s’est maintenue, mutatis mutandis, au-delà de 1852, quand bien même les concours permettant l’accès aux chaires étaient alors supprimés et remplacés par un système de présentation auquel les candidats à des chaires de création nouvelle ont continué à être soustraits.

Le décret organique du 9 mars 1852, supprimant en effet les concours pour les chaires, a semblé mettre la nomination des professeurs titulaires à l’entière discrétion du pouvoir exécutif, le ministre Fortoul parlant d’ailleurs crûment de la nécessaire liberté d’action du gouvernement. Toutefois, même sous le Second Empire, cette liberté n’a pas été sans limites. Dès 1852, et bien qu’en droit strict les présentations ne fussent pas censées lier le ministre, celui-ci a pris l’habitude de trancher entre les deux candidats présentés à sa nomination, l’un par la Faculté où la vacance de la chaire était constatée et l’autre par le conseil académique. Le système de présentation fut notablement amélioré à partir de la Troisième République. En effet, la loi du 27 février 1880 a donné davantage d’autonomie aux facultés relativement au choix de leurs enseignants, le choix du ministre s’effectuant désormais entre les deux propositions faites par le Conseil de la Faculté concernée par la vacance et les deux propositions faites par le Conseil Supérieur de l’Instruction Publique, institution au sein de laquelle siégeaient désormais des professeurs élus.

En outre, s’il restait toujours théoriquement possible à un candidat docteur en droit, âgé de 30 ans au moins, ayant une expérience préalable d’au moins deux ans dans l’enseignement supérieur, d’être présenté à la nomination à une chaire ancienne, la création du corps des agrégés des facultés de droit, annoncée en 1854 et effective à partir 1856, a restreint encore davantage l’éventail du choix ministériel puisque ce dernier corps, toujours recruté sur concours, devait être, sinon en droit du moins de fait, le pourvoyeur exclusif aux fonctions de professeur titulaire d’une chaire dans les facultés de droit.

Ces règles de recrutement, conçues initialement pour la seule métropole, ont finalement été étendues à l’Algérie à partir de la loi du 30 décembre 1909 qui a érigé en facultés les quatre écoles préparatoires algériennes. Les établissements d’enseignement supérieur de la colonie algérienne avaient, en effet, bénéficié de règles dérogatoires dans les trente premières années de leur existence, dans le but précisément de faciliter le recrutement des divers corps enseignants. Le décret du 5 juin 1880, pris en application de la loi du 20 décembre 1879, avait prévu que les professeurs titulaires desdites écoles, nommés par le ministre de l’Instruction publique sur présentations faites par la section permanente du Conseil supérieur de l’Instruction publique, devraient posséder le doctorat, mais aucune condition d‘âge, ni de stage préalable n’avait été posée.

Une fois nommé sur sa chaire, le professeur titulaire bénéficiait d’une véritable inamovibilité qui, sauf manquements graves à la discipline professionnelle dont le Conseil Supérieur de l’Instruction Publique était juge, fut entendue comme une inamovibilité à vie jusqu’en 1885. Il a fallu bien des déboires avec des professeurs ayant obstinément refusé de renoncer à leur enseignement, alors même que leur état physique et/ou mental ne leur permettait plus de l’assurer correctement, pour que l’article 39 du décret du 28 décembre 1885 finisse par fixer à 70 ans l’âge légal de la retraite, les professeurs des facultés par ailleurs membres de l’Institut pouvant prolonger leurs fonctions jusqu’à l’âge de 75 ans. Cette inamovibilité ne signifiait nullement que le professeur fût attaché ad vitam aeternam à une chaire et à une faculté, mais elle signifiait qu’aucun transfert du professeur sur une autre chaire dans la même ou dans une autre faculté n’était possible si l’intéressé ne l’avait pas expressément souhaité.

L’unité que les règles de recrutement conféraient apparemment au corps des professeurs titulaires a toujours été sérieusement affectée par des disparités de traitement financier qui n’ont pas été pour rien dans l’attraction, par ailleurs tant déplorée, exercée par les facultés parisiennes. Dès le début du 19e siècle, deux éléments composaient le traitement du professeur titulaire : un élément fixe, versé par l’Etat, un élément dit « éventuel », alloué annuellement soit au titre des droits de présence aux examens, soit en proportion du nombre d’élèves inscrits à la Faculté. Compte tenu de la traditionnelle concentration des étudiants français à Paris, l’éventuel dont bénéficiaient les professeurs parisiens représentait une plus que nette amélioration de leur ordinaire salarial. La suppression de l’éventuel par le décret du 14 octobre 1876 n’a nullement signifié la fin de cette situation d’inégalité qui, bien au contraire, a été perpétuée par la durable création, en vertu du décret du 12 février 1881, de deux cadres de traitement : le cadre des facultés de Paris et celui des facultés des départements. Il n’a été mis fin à cette disparité qu’avec le décret 61-1004 du 7 septembre 1961, fixant les conditions d’avancement des professeurs des facultés des universités.

Cette image d’un corps professoral à deux vitesses a été également confortée à partir des années 1880 par l’usage durable consistant à ne pas admettre immédiatement dans une chaire parisienne le professeur titulaire d’une faculté de province, mais à l’intégrer progressivement dans la faculté de la capitale en lui faisant subir préalablement – et parfois pendant une longue période – une sorte de cursus honorum l’obligeant à repasser par les étapes de chargé de cours et/ou agrégé, maître de conférences, professeur adjoint, professeur sans chaire, avant que de le titulariser.

Bibliographie :

  • A. de Beauchamp, Recueil des lois et règlements sur l'enseignement supérieur : comprenant les décisions de la jurisprudence et les avis des conseils de l'Instruction publique et du Conseil d'État, Tome 1 (1789-1847), Paris, 1880.
  • « Instruction Publique », Répertoire du droit administratif Béquet, Paris, 1902..
  • Réforme de l’enseignement. Recueil des lois, décrets, arrêtés, instructions, circulaires et notes ministérielles concernant les modifications apportées à l’Instruction Publique pendant le Ministère de M. H. Fortoul, Tome 2, Paris, 1886..
  • J. Delpech, Statut du personnel enseignant et scientifique de l’enseignement supérieur, Paris, Sirey, 1935 (2e édition). Du même, même titre, 2e édition entièrement refondue jusqu’au 15 janvier 1949, Paris, Sirey, 1949.
  • Agrégé (Ancien Régime)

    L’édit de Saint Germain d’avril 1679 – texte fondamental pour la réforme des études juridiques sous l’ancien régime - a instauré le corps des docteurs agrégés qui avaient pour mission d’assister les professeurs ordinaires. Leurs attributions ont été précisées par la déclaration du 6 août 1682 : ils devaient principalement assister aux examens et aux thèses avec les professeurs ordinaires et remplacer ces derniers en cas de vacance d’une chaire, ils pouvaient encore exercer des fonctions de répétiteurs, mais seulement de façon privée. Initialement élus par la faculté, ils pouvaient être choisis parmi les avocats, les magistrats et juges honoraires âgés d’au moins trente ans. Avec la déclaration du 19 janvier 1700, c’est désormais par concours que les docteurs agrégés devaient être recrutés à partir, cette fois-ci, de l’âge de 25 ans. De cette manière, conforme à la volonté de l’Etat monarchique de renforcer les compétences des enseignants des facultés de droit, tout en luttant contre la brigue familiale qui faisait des ravages, un vivier de docteurs compétents avait été constitué, lequel avait toute vocation à succéder aux professeurs ordinaires, dits encore docteurs régents. A bien des égards, les docteurs agrégés de l’ancien régime annoncent les professeurs suppléants que créera la législation napoléonienne.

    Bibliographie :

    • Isambert, Recueil général des anciennes lois françaises, depuis l’an 420 jusqu’à la Révolution de 1789, Tome XV, p.p. 63-98.
    • Répertoire Guyot (Répertoire universel et raisonné de jurisprudence civile, criminelle, canonique et bénéficiale, ouvrage de plusieurs jurisconsultes, 1775-1783, Tome LXII (article Université), p.p. 394-449.
    • Myriam Biscay, Pouvoir et enseignement du droit en France et dans l’Italie du Nord du XVIIIe siècle à la fin de Premier Empire, Thèse de doctorat, Université Lyon 3, 2013.

Professeur de droit (Ancien Régime)

Ce statut – qui correspond dans notre base de données au souci d’identifier ceux des enseignants issus des Facultés de droit de l’ancien régime auxquels on a eu recours en 1804 - manque d’unité. Il renvoie en réalité – et en schématisant à l’excès, car il est difficile de rendre compte en quelques lignes de la complexité et de la diversité inhérente à la période - à des statuts différents.

Volontiers appelés encore docteurs régents ou professeurs ordinaires, les professeurs de droit avaient été, depuis les origines médiévales des Facultés de droit, de deux sortes : professeur de droit civil (comprendre, professeur de droit romain) et professeur de droit canon. Ils étaient traditionnellement choisis librement par l’assemblée des maîtres en exercice d’une faculté. Rémunérés par de faibles gages, ils tiraient au vrai l’essentiel de leurs revenus des droits qu’ils percevaient directement des étudiants.

L’article 86 de l’Ordonnance de Blois de 1579 a introduit une modification de taille. Ce texte, qui signale les premières manifestations du désir de contrôle des Facultés de droit par le pouvoir royal, a introduit pour le recrutement des professeurs de droit civil et de droit canon une modification d’importance. C’est désormais par la voie du concours public, appelé encore disputatio, que ces enseignants devaient être désormais recrutés dans toutes les facultés de droit existantes. Pour atténuer le choc que représentait cette nouveauté, il était prévu que le concours se déroulerait localement au niveau de la Faculté où une chaire était à pourvoir, les professeurs en fonctions étant juges des épreuves et décidant donc de l’admission d’un nouveau collègue. Le concours ainsi instauré, dont d’autres ordonnances royales ultérieures réitéreront la nécessité, avait sans aucun doute pour objet de lutter contre l’étroite cooptation familiale qui prévalait alors dans les facultés de droit du royaume, cooptation qui faisait volontiers passer les intérêts du clan avant la compétence du futur professeur… Il faut croire, toutefois, que la mesure – qui a engendré un véritable contentieux - n’a pas été toujours scrupuleusement respectée et qu’elle n’a pas suffi à mettre fin aux traditionnelles brigues familiales.

En effet, le développement de l’emprise de l’Etat royal sur les Facultés de droit s’est à nouveau manifesté sous le règne de Louis XIV, dans l’édit d’avril 1679, par la création d’un nouveau professeur : le professeur royal de droit français, chargé de la délicate mission d’enseigner le droit positif, c’est-à-dire le droit contenu dans la législation royale et dans les coutumes. Contrairement à ses collègues qui l’avaient précédé sur les chaires de droit civil et de droit canon, le nouveau venu était nommé directement par l’autorité royale, sans concours, et sans qu’il fût besoin pour lui d’être en possession du doctorat. Choisi de façon privilégiée parmi les praticiens du droit chevronnés, il devait, en outre, être rémunéré par l’Etat. Cette dernière mesure est demeurée très souvent théorique en raison de l’état structurellement délabré des finances royales. Aussi, pour permettre à ce nouveau professeur de vivre, il a bien souvent été adjoint une chaire de droit romain à sa chaire de droit français.

Facultés fort critiquées et discréditées au XVIIIe siècle en raison de la routine sclérosée de leurs enseignements et de la vénalité, en certains lieux très ostensible, qui prévalait dans la dispense des diplômes, les Facultés de droit, comme leurs homologues de théologie, médecine et arts, ont été supprimées par la Convention en 1793.

Bibliographie :

  • Denis Alland et Stéphane Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, Paris, PUF, 2003. (articles « Enseignement du droit » par Christian Chêne et « Professeur de droit » par Jean-Marie Carbasse)
  • Guy Antonetti, Les professeurs de la Faculté des droits de Paris : 1679-1793, Paris, Éditions Panthéon-Assas, 2013.
  • Christian Chêne, L’enseignement du droit français en pays de droit écrit (1679-1793), Paris, Droz, 1982.
  • Isambert, Recueil général des anciennes lois françaises, depuis l’an 420 jusqu’à la Révolution de 1789, Tome XIX, p.p. 195-202.
  • Répertoire Guyot (Répertoire universel et raisonné de jurisprudence civile, criminelle, canonique et bénéficiale, ouvrage de plusieurs jurisconsultes, 1775-1783, TLXII (article Université), p.p. 394-449.

Professeur (écoles françaises de droit français à l'étranger)

Ce statut renvoie au cas très particulier des enseignants des écoles françaises de droit du Caire et de Beyrouth, créées respectivement en 1891 et en 1913. Ces écoles ont relevé très largement pour leur financement et leur fonctionnement matériel du ministère français des Affaires Etrangères, lequel était l’autorité de tutelle de ces établissements à bien des égards atypiques. En effet, ils méconnaissaient, notamment, la structuration des enseignements et des personnels autour de la notion de chaire, si fondamentale dans les diverses Facultés d’Etat. Pour leur vie pédagogique et scientifique et leur administration courante, ces établissements relevaient, pour l’école égyptienne à partir de 1918, de la Faculté de droit de Paris et pour l’école libanaise d’un tandem étonnant constitué par la Faculté de droit de Lyon et la Compagnie de Jésus.

Si le titre de professeur est volontiers décerné aux membres de leur personnel enseignant, ce vocable ne renvoie pas aux réalités statutaires en vigueur dans les Facultés de droit françaises. Simples docteurs en droit, le plus souvent français mais parfois autochtones, les professeurs en question étaient présentés à la nomination du ministre des Affaires Etrangères par le Conseil de la Faculté dont relevait l’école à laquelle ils se destinaient. La plupart d’entre eux n’avaient été ni admissibles, ni même candidats au concours d’agrégation avant leur prise de fonctions. Aucun système de cotisation à la retraite, aucun âge, même, de la retraite, aucune sécurité de l’emploi n’avaient été prévus pour ces enseignants qui avaient accepté de s’expatrier pour défendre le rayonnement international du droit français et qui étaient exposés au risque que des circonstances internationales ou des considérations politiques supérieures viennent, un jour, mettre fin brutalement à leur activité.

Dès les années 1930, cette catégorie d’enseignants est en voie d’extinction en Egypte, où l’on a préféré désormais faire appel à des agrégés venus de métropole. Il faut attendre les années 1950 pour qu’un mouvement similaire se produise dans l’école française de droit de Beyrouth.

Bibliographie :

  • C. Fillon, « L’enseignement du droit, instrument de diplomatie culturelle - L’exemple de l’Egypte au début du 20e siècle », Mil Neuf Cent, Revue d’histoire intellectuelle, n°29, « La Belle époque des Juristes – Enseigner le droit dans la République », 2011, p.p.123-144.
  • C. Fillon, « La Faculté de droit de Lyon et l’expansion universitaire sous la Troisième République : La Fondation de l’Ecole de droit de Beyrouth », Le renouvellement des sciences sociales et juridiques sous la IIIe République - Contributions réunies par David Deroussin, Paris, Editions La Mémoire du droit, 2007, pp. 303-331.
  • C. Fillon, « Le Jésuite, l’Universitaire et le Politique : Stratégies de recrutement du corps enseignant de l’Ecole Française de droit de Beyrouth (1913-1939) », Les Facultés de droit de province aux 19e et 20e siècles - Les conquêtes universitaires, T.3, EDHIP/n°16, 2012, Presses de l’Université de Toulouse I, p.p.115-138.

Professeur autorisé à assurer l’enseignement d’une chaire

Le statut de « professeur autorisé à assurer l’enseignement d’une chaire » ne correspond à aucun statut juridique à proprement parler. C’est une appellation que nous avons créée pour rendre compte de deux types de cas de figure que les archives nous ont révélés :

  • 1) La suppléance d’un professeur titulaire par un autre professeur titulaire. Le titulaire d’une chaire a été amené à prendre en charge, en plus des enseignements habituels relevant de sa chaire, ceux d’un collègue lui-même titulaire d’une autre chaire, mais empêché pour quelle raison que ce fût d’assurer son service (décès en cours d’année, maladie, mobilisation militaire, élection politique ou bien encore chaire demeurée vacante en raison du refus de la faculté ou du ministère de la pourvoir pendant un certain temps)
  • 2) L’échange d’enseignements entre professeurs titulaires. Le professeur titulaire d’une chaire demande et obtient de pouvoir procéder à un échange de cours avec l’un de ses collègues, lui-même titulaire. Aucun des deux n’a assuré pendant l’épisode considéré les enseignements relevant normalement de sa chaire.

Professeur honoraire

Titre créé par le décret du 28 décembre 1885 (article 41), il était décerné par décret ministériel, pris après avis de l’assemblée de la Faculté, aux professeurs qui avaient demandé leur admission à la retraite ou qui se rendaient démissionnaires pour d’autres motifs. A partir du décret du 28 mai 1921, ce même titre pouvait, de plus, être conféré aux professeurs appelés à d’autres fonctions après avoir appartenu à une Faculté pendant une période de trois ans en qualité de titulaire. Tous les professeurs recensés à ce jour dans SIPROJURIS ont bénéficié sans difficulté aucune de l’honorariat. Si ce statut figure ici, c’est essentiellement dans le but d’identifier ceux des professeurs honoraires –au sens de professeurs retraités - qui ont été amenés, le plus souvent en raison des vacances engendrées dans les facultés par les conflits mondiaux - à reprendre bénévolement du service.

Bibliographie :

  • Joseph Delpech, Statut du personnel enseignant et scientifique de l’enseignement supérieur, Paris, Sirey, 1935 (2e édition)